
Les Obscurs projettent l’écriture collective d’un manifeste.
On trouve ici une version du deuxième article intitulé «pluralité des formes-de-vie ».
Il fait suite à l’article publié le 13 octobre 2022, sous le titre « sans attendre » :
Ce fragment, comme les suivants, est soumis à la critique de nos amis et lecteurs.
On ne va pas attendre cent ans pour vivre libres.
Et vivre libres commence avec pouvoir décider de la forme-de-vie qui nous convient et la mettre en œuvre.
La forme-de-vie ne se réduit pas à un mode de vie ou à un style de vie. Elle est le cadre général dans lequel se disposent les différents éléments de notre vie, soit choisis, soit reçus ou subis. Elle est en quelque sorte la grammaire de notre existence.
Le premier principe du choix d’une forme-de-vie est la primauté donnée à telle ou telle catégorie de vie active : le travail, l’oeuvre ou l’exercice, l’action, renvoyant de manière non univoque aux grands domaines de la vie ( économie, art ou culture, politique).
Comme il est rare que le type de vie active retenu suffise à saturer l’espace de la décision sur la forme-de-vie, le deuxième principe du choix est une combinaison appropriée à l’individu ou au collectif de deux ou trois types de vie active : par exemple, travail et action.
D’un point de vue critique, le choix d’une forme-de-vie se manifeste comme un conflit avec l’ordre social en tant que représentation factice des différentes vies actives détruites, et articulation-réunification spectaculaire des vies séparées. C’est un combat contre l’industrialisation et la marchandisation des consciences et des vies, qui produisent cette mixture d’employé consommateur, d’électeur bureaucratisé, de télé-spectateur et d’illettré numérique qu’est le parfait pion de la société du spectacle.
Nous ne prétendons pas disposer de la bonne formule de vie. Nous trouvons cette prétention ridicule et entachée d’une religiosité aussi vaine qu’indiscrète. Nous affirmons le principe d’une pluralité des formes-de-vie.
La composition d’une forme-de-vie ne se limite pas aux choix autour des types de vie active. Il comprend encore le choix sur le type de relation, plus ou moins intensive, de la personne à elle-même, ainsi que les relations entre le Je et le Tu, entre l’individu et le collectif.
Le choix d’une forme-de-vie n’est pas une conversion ; il peut être limité dans le temps, à certaine période de la vie, ou résonner différemment selon les espaces de vie. Qui veut changer de vie, ou changer sa vie, doit changer de forme-de-vie. Enfin la forme-de-vie, en tant que décision, ne relève pas d’une loi objective ; sa traduction concrète est à la fois subordonnée aux affinités et impulsée par elles.